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Série Café virtuel de l'EFPC : Le travail à la demande et la réorganisation des marchés modernes (TRN5-V32)

Description

Cet enregistrement d'événement présente une conversation avec Wingham Rowan, entrepreneur britannique et président de Modern Markets for All, sur les défis auxquels sont confrontés les travailleurs irréguliers dans l'économie d'aujourd'hui, sur les mesures prises par les gouvernements pour corriger les inefficacités du marché et sur les moyens par lesquels les politiques pourraient contribuer à remodeler la relation entre les travailleurs irréguliers et leurs employeurs.

(Consultez la transcription pour le contenu en français.)

Durée : 00:53:33
Publié : 29 mars 2022
Type : Vidéo

Événement : Série Café virtuel de l'EFPC : Le travail à la demande et la réorganisation des marchés modernes


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Série Café virtuel de l'EFPC : Le travail à la demande et la réorganisation des marchés modernes

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Transcription : Série Café virtuel de l'EFPC : Le travail à la demande et la réorganisation des marchés modernes

[Le logo de l'EFPC apparaît à l'écran.]

[Un appel vidéo apparaît avec Taki Sarantakis et Wingham Rowan.]

Taki Sarantakis, École de la fonction publique du Canada : Bonjour ou bonsoir à vous, selon l'endroit où vous vous trouvez. Je m'appelle Taki Sarantakis. Je suis le président de l'École de la fonction publique du Canada (EFPC). Nous revoici avec une autre présentation du Café virtuel de l'EFPC, qui nous permet de rencontrer des gens fascinants et d'écouter leurs idées intéressantes qui sont d'intérêt général pour la communauté de la fonction publique du Canada. Aujourd'hui, nous parlerons d'un sujet vraiment intéressant, comme c'est toujours le cas. Mais aujourd'hui nous aborderons un sujet plus qu'intéressant, un sujet quelque peu novateur, soit les marchés modernes pour tous. Vous comprendrez ce que cela signifie au fur et à mesure de la conversation. Vous savez tous que nous sommes à l'époque de l'utilisation de plateformes. Ces plateformes commencent à avoir des répercussions vraiment disproportionnées sur notre vie. Vous connaissez tous pratiquement l'ensemble de ces plateformes qui sont importantes et qui sont des plateformes privées. Aujourd'hui, nous allons parler éventuellement de... Je ne vous le dis pas tout de suite. Veuillez vous installer et prendre quelques minutes de votre temps... Ce sont les plateformes d'intérêt public. C'est une autre façon de vous annoncer le sujet du jour.

Aujourd'hui, nous accueillons monsieur Wingham Rowan. Il se trouve à... Je ne sais pas s'il est à Los Angeles ou ailleurs en Californie. Mais il est loin d'ici. Il est le président d'une organisation appelée Modern Markets for All. Il a fait l'objet d'un article dans mon magazine préféré – mes excuses à tous les autres : The New Yorker. Quand vous vous retrouvez dans The New Yorker, vous êtes comme un dieu. Un dieu avec un « d » minuscule. Partout dans le monde, des gens aiment The New Yorker. Wingham, sans plus attendre, nous allons vous céder la parole. Je vois que votre présentation se divise en trois parties. Nous allons écouter une partie, faire une pause, discutez, et procédez de la même façon pour le reste de la présentation. À vous, monsieur.

[Wingham partage son écran et nous présente un diaporama. La première diapositive montre deux parents tenant la main de leur jeune enfant. Le titre est : « Des marchés modernes pour tous : Une politique pour l'après-emploi. » À côté de la famille, on voit la manchette du 18 décembre 2019 du New York Times : « Le travail d'appoint fait de plus en plus partie de la culture américaine pour une vaste part de la population. » Le nom de Wingham Rowan apparaît avec son site Web : www.ModernMarketsforAll.org.]

Wingham Rowan, Modern Markets for All : Excellent. Merci, Taki. Oui. Dans la première partie, j'aimerais vous renseigner au sujet d'un problème que nous vivons dans l'économie d'aujourd'hui. Alors, quand vous pensez à l'avenir du travail, et je suis certain que bon nombre de personnes qui regardent ce webinaire y pensent... Sans y réfléchir, vous supposez probablement qu'on parle de l'avenir des emplois. J'ai dirigé des programmes du gouvernement britannique qui mettaient l'accent sur les gens qui cherchaient du travail, pas un emploi. Des organismes publics sont en train de reproduire de tels programmes ici même en Californie. Alors, comme vous avez dit, je me trouve actuellement à Los Angeles. La raison pour laquelle cette question mérite notre attention est la suivante : les gens qui recherchent du travail irrégulier, du travail à la demande, passent souvent à travers les mailles de tous les types de programmes gouvernementaux et philanthropiques. Mais, quand vous commencez à examiner attentivement les problèmes auxquels ils sont confrontés, vous découvrez rapidement un genre de... une sorte d'injustice brutale dans l'ensemble du capitalisme moderne et vous constatez comment le problème peut être réglé.

[La diapositive change. En trois sections, elle montre des gens et des tableaux. On peut lire sur la diapositive : « LES TRAVAILLEURS : Qui étaient-ils avant la pandémie de Covid-19? » La première section du tableau est : Régimes de travail irréguliers – essentiel. La deuxième section porte le titre suivant : Régimes de travail irréguliers – leur plein gré. La troisième section est : Régimes de travail irréguliers – contre leur gré.]

Donc, pour la première partie, concentrons-nous uniquement sur le problème pour un instant. Alors, pour comprendre la situation, je veux commencer par vous présenter la clientèle que je sers. Environ 20 % des adultes – les données varient en fonction des recherches que nous utilisons – ne peuvent occuper un emploi pour l'instant. Ils ont un problème de santé qui fluctue d'une journée à l'autre. Ils présentent des besoins complexes pour ce qui est de leur rôle parental ou des soins qu'ils doivent donner à un membre de la famille. Ils étudient, et leur horaire est imprévisible. Quand ils se lèvent chaque matin, ils se posent la question suivante : puis-je travailler aujourd'hui? Je ne sais pas. Cela dépend du genre de journée que j'aurai.

Vous pourriez être surpris du nombre de personnes qui pourraient occuper un emploi; par contre, quand ils regardent les emplois qui s'offrent à elles, elles préféreraient se retrouver devant un éventail d'emplois à la demande. Et je ne parle que des emplois peu qualifiés dans le présent cas. Je ne parle pas des concepteurs Web, des traducteurs, des rédacteurs, des comptables et des avocats qui peuvent travailler chez eux. Je pense plutôt à ce que vous pourriez appeler les travailleurs à la demande. Toutefois, j'aimerais bien vous convaincre que le problème est beaucoup plus vaste que cela. Et, troisièmement, il y a ceux qui travaillent à temps partiel.

De plus en plus, on se retrouve avec des employés qui sont peu qualifiés et dont l'horaire est déterminé au moyen de systèmes de planification de la main-d'œuvre qui peuvent fonctionner de façon extrêmement précise lorsqu'il s'agit de faire entrer du personnel ou d'en retourner chez eux. On constate une absence totale de données en ce qui a trait à ce volet du marché du travail. Vos données de Statistique Canada ne seront pas suffisamment détaillées pour saisir ce qui est en train de se passer. Mais, si vous me demandiez quel pourcentage d'adultes canadiens appartenait à chacune de ces catégories avant la pandémie de COVID, je pourrais vous montrer des recherches, des recherches indépendantes qui viendraient justifier ces chiffres. Les chiffres seront plus élevés maintenant.

[Un nombre apparaît sous chaque section : 15 %, 10 % et 10 % respectivement.]

Pour faire une histoire courte, si vous voulez vous attaquer aux problèmes que cette cohorte doit surmonter, vous devez vous concentrer sur un enjeu que j'appellerai la qualité des marchés disponibles, car normalement, une personne occupant un emploi entrera sur le marché du travail à des intervalles de quelques années quand il est temps de passer à autre chose. Dans un tel monde, vous pouvez entrer sur le marché du travail et en sortir plusieurs fois par jour alors que vous êtes à la recherche de travail supplémentaire. Ainsi, les marchés auxquels vous pouvez accéder, où vous pouvez trouver une occasion de faire de l'argent, sont absolument essentiels.

Nous avons donc décidé d'analyser la qualité des marchés sur lesquels cette portion du marché du travail peut se fier. Pour ce faire, nous devons comparer les marchés qu'ils utilisent avec ce qui se passe avec les marchés et en général dans l'économie actuellement.

[La diapositive change. On y lit : « LE PROBLÈME? L'iniquité des marchés. »]

Voilà où tout cela devient perturbant. Je vais donc vous transporter, si vous me le permettez, dans l'univers de ce que nous appelons l'iniquité des marchés. Pour ce faire, je devrai faire sortir mon côté technophile. Je vous demande d'être patient, je reviendrai plus tard à l'aspect humain.

[La diapositive change. On y lit : « LES MARCHÉS : la pierre angulaire du capitalisme. » L'image de gauche montre une mère et son enfant dans une épicerie. L'image à droite est celle de deux femmes en train de vendre des trucs dans l'aire de stationnement d'un marché agricole.]

Par contre, de façon générale, quand je parle de marchés, je fais référence aux bases du capitalisme. J'entends par là tout échange au cours duquel les acheteurs d'une ressource quelconque rencontrent les vendeurs. Je ne parle pas des marchés dans le sens politique amorphe où vous l'utiliseriez habituellement. Les marchés existent depuis des siècles, bien entendu. Pendant des siècles, personne n'a vraiment eu besoin d'analyser l'efficience relative des marchés dans diverses parties de l'économie. Elles fonctionnaient toutes environ au même niveau. Tout cela a commencé à changer dans les années 1980 avec la préprogrammation des transactions boursières. Et puis il y a vraiment eu de gros changements vers la toute fin des années 1990.

[La diapositive change. On y lit : « LES MARCHÉS MODERNES : une nouvelle ère » et on voit les logos de Spotify, Expedia, eBay et Amazon.]

Nous nous retrouvons désormais devant une toute nouvelle ère de marchés. Et ces marchés sont exponentiellement plus puissants que ce qui existait auparavant en ce qui a trait aux offres que chaque marché contient, aux outils qu'il peut offrir à la négociation, aux données qu'il peut générer et à sa capacité de couper les coûts indirects. Mais également en ce qui a trait à la capacité de centraliser le pouvoir et de manipuler les marchés. Attardons-nous encore au fonctionnement – désolé, c'est encore le technophile en moi qui s'exprime. Patientez un peu. Au niveau du fonctionnement, il existe tout un éventail de nouvelles technologies qui sont arrivées à maturité, qui ont normalement été élaborés instantanément dans le cadre de programmes de recherche gouvernementaux.

[La diapositive change. On y lit : « MARCHÉS MODERNES : sous le capot. » Dans la partie gauche de l'écran, les éléments suivants sont énumérés sous forme de puces : Authentification; Connectivité; Fonctions d'affichage; Outils des réseaux, Interopérabilité; Exploration de données; Système de paiement. Ces mots sont réunis par une accolade qui pointe vers le côté droit de l'écran, où l'on peut lire : Technologies des marchés modernes.]

Je vais les appeler collectivement les technologies des marchés modernes. L'élément clé pour comprendre l'iniquité qui existe sur ces marchés est de savoir que ces technologies sont utilisées de façons très différentes, dans divers secteurs de l'économie.

[La diapositive change. On y voit une grille d'évaluation d'un marché en fonction de cinq critères. On y lit : « LES MARCHÉS MODERNES : comment les évaluer? » Le titre du tableau est : « Voici les cinq facteurs utilisés pour évaluer un marché (pour ses vendeurs). » La première ligne est : Profondeur; la ligne à côté est la suivante : Quel est le pourcentage d'acheteurs éventuels qui ont recours à ce marché? (idéalement, 100 %) La deuxième ligne est la suivante : Étendue; la ligne à côté est : Quel pourcentage de tous les actifs/atouts que les vendeurs pourraient vendre pourraient être effectivement échangés sur ce marché? (idéalement, 100 %) La troisième ligne est la suivante : Portée de la fonctionnalité; la ligne à côté est : Contrôle total des modalités/paramètres de vente? Jumelage sans effort? Données utiles? Interventions acceptées? La quatrième colonne porte le titre suivant : Frais; la ligne à côté est la suivante : Quelle part des gains des vendeurs est retenue par les opérateurs de marché? La cinquième colonne est : Gouvernance; la ligne à côté est la suivante : Atténuation des risques des transactions? Protection des renseignements personnels? Neutralité? Transparence? Reddition de comptes? Vérification?]

C'est ce que nous voulions comprendre et essayer de commencer à rendre le tout concret. Nous nous sommes donc demandé comment faire pour donner une cote à l'un de ces nouveaux marchés? Comment pouvons-nous le coter par rapport à ce qui est possible et à ce qui est offert? Et quand je parle de coter un marché, je ne m'intéresse pas à ce que ce marché offre aux acheteurs. Les nouvelles façons à la mode d'acheter des trucs ne permettent pas de régler les factures à long terme. Je me concentre vraiment sur ce que le marché que nous voulons coter peut offrir aux vendeurs. Cela pourrait s'apparenter à un exercice intellectuel, car personne ne possède de marchés parfaits. En fait, personne n'en possédait jusqu'à... il y a 25 ans environ, alors que Wall Street a convaincu les acheteurs d'actifs financiers de s'engager sur des marchés où pourraient s'effectuer de nombreuses transactions différentes. Par contre, ces transactions sont interexploitables. Donc, effectivement, elles se font pour le compte des vendeurs au moyen d'une vaste plateforme intégrée. Ces plateformes ont des capacités de production de données extraordinaires. Elles comptent des outils servant à la négociation et à l'atténuation des risques ou permettant de cibler de façon proactive une occasion que nous pouvions à peine envisager. Et elles peuvent faire tout cela en imposant des coûts indirects représentant souvent des pourcentages, ou plutôt des fractions de 1 %. Par ailleurs, on a demandé à des organismes gouvernementaux de créer de nouvelles institutions qui réglementeraient ces marchés et qui assureraient leur solidité et leur transparence. C'est ce qui a été fait. Et nous sommes heureux de pouvoir compter sur des marchés efficaces. Nous sommes tout à fait d'accord avec cette idée; nous sommes des capitalistes. Jusqu'à ce que vous fassiez une comparaison avec ce qui s'est passé ailleurs dans le secteur de l'économie.

[La diapositive change. On voit des icônes et des plateformes divisées en trois sous-sections. La première s'intitule « Sites d'emplois » et présente des sites Web de banques d'emplois; la deuxième est « Plateformes d'emplois à la demande » et affiche des logos de sites Web de travail à la demande; la troisième s'intitule « Employeurs/Agences » et montre des logiciels permettant d'offrir des emplois et de combler des postes.]

Alors, que retire-t-on de l'ère des marchés modernes du point de vue du travail? Des sites d'offres d'emplois à faible coût faisant peu appel à la technologie; il s'agit simplement d'annonces classées et d'un moteur de recherche. Nous connaissons tous les plateformes de travail à la demande; il en existe des milliers. Elles génèrent beaucoup d'argent. On en entend beaucoup parler. Mais, du point de vue de la vente, elles ne sont pas pertinentes. L'incidence réelle se situe au niveau de ces systèmes de planification de l'horaire des effectifs. Pour ceux qui ne connaissent pas ces systèmes, ils exploitent effectivement des marchés monopsones. Ainsi, un seul responsable peut acheter le temps ou les heures de son bassin d'employés. C'est le seul acheteur sur le marché. Et tous ces paramètres peuvent être réglés avec exactitude au jour le jour, selon les besoins à l'heure, en faisant entrer des gens au travail. Cette façon de faire a une incidence sur les travailleurs qui font le service dans nos chambres d'hôtel, qui s'occupent de la caisse à l'épicerie et qui nous servent le café. Elle se répand actuellement jusqu'aux emplois les moins qualifiés.

Je veux vous donner un bref aperçu de ces nouveaux marchés du travail appartenant au domaine des hautes technologies. Pour ce faire, je dois utiliser une valeur de remplacement, car on ne retrouve ni transparence, ni obligation redditionnelle ni capacité d'audit, des éléments qui sont à la base des marchés de Wall Street. J'utiliserai comme valeur de remplacement Uber, car cette entreprise constitue l'un de ces nouveaux marchés du travail qui a été le plus décortiqué. Mais ce n'est certainement pas le marché qui a eu la plus grande incidence en ce qui a trait aux vendeurs.

[La diapositive change et le titre est : « MARCHÉS MODERNES : et la main-d'œuvre? » On voit la manchette du 19 janvier 2016 dans The Observer qui est la suivante : « Uber Drivers Plan Boycott After Fare Cuts Slash Their Earnings to Below Minimum Wage. »]

Alors, au cas où vous n'étiez pas... Uber s'est fait prendre à couper systématiquement les gains de ses vendeurs. L'entreprise l'a fait à de nombreuses reprises. Elle exploitait un logiciel qui repérait des organes de réglementation, puis les trompait. Elle faussait les données du marché qu'elle dirigeait pour désavantager les marchés concurrentiels, dans le but d'essayer d'attirer leurs vendeurs.

[Le titre change. On voit la manchette du site Web The Verge du 8 septembre 2017 qui est : « Uber is under FBI investigation over software it used to track Lyft drivers ».]

Lorsqu'une première administration, l'État de Californie, a dit que c'était assez et a adopté une loi, la loi AB5, pour offrir des mesures de protection aux travailleurs utilisant ces plateformes, Uber a mobilisé ses compétiteurs et a investi 205 millions de dollars pour renverser cette loi dans le cadre d'une campagne connue sous le nom de Proposition 22. Ils ont gagné, et leur valeur a augmenté instantanément de 30 milliards de dollars à la suite de cet investissement d'environ 200 millions de dollars.

[Le titre change pour une manchette publiée dans The Guardian le 11 novembre 2020, qui est la suivante : « Prop 22: why Uber's victory in California could harm gig workers nationwide ».]

Dans le cadre de la campagne relative à la Proposition 22, Uber a fait un certain nombre de promesses visant à donner une plus grande marge de manœuvre et plus de contrôle à ses vendeurs. Et aujourd'hui, vous pouvez probablement deviner ce qui s'est passé avec ces promesses une fois la loi renversée.

[Le titre change pour une manchette publiée dans le Los Angeles Times le 28 mai 2021, qui est : « Uber se rétracte quant à la souplesse qu'il a promise aux chauffeurs pour gagner leur soutien à l'égard de la proposition 22 ».]

Ainsi, pour ce service, Uber demande habituellement 30 % des gains de chaque vendeur. Vous vous dites peut-être : « Mais, alors pourquoi quelqu'un irait vendre ses services sur Uber? » Il n'a pas le choix. C'est à cet endroit que sont rendus les acheteurs. Dans les nouvelles villes, Uber subventionne les acheteurs jusqu'à concurrence de 60 % du coût de leur tarif. Voilà pourquoi les acheteurs passent aussi rapidement à Uber. Et Uber n'est pas un cas particulier dans ce nouveau monde des marchés du travail du secteur des hautes technologies. C'est un précurseur. Uber est devenue l'entreprise privée ayant enregistré la plus forte valeur au monde jusqu'à présent. Des milliers d'entreprises se battent désespérément pour devenir l'entreprise « Uber » de leur secteur du marché du travail. Et je sais que ce contexte peut entraîner un genre de surmenage. Je sais qu'il est tentant d'essayer de classer cette affaire comme étant de faible importance, vous savez.

Oui, il y a ces marchés incroyables que l'on trouve dans le haut de l'économie. Et vous avez ces pseudoéchanges mesquins, qui sont bien franchement de troisième ordre, dans le bas. Mais la plupart des gens ont encore des emplois. La plupart des activités se déroulent à l'extérieur de ces nouveaux marchés de hautes technologies. J'aimerais vous montrer deux graphiques qui, je l'espère, feront disparaître toute certitude que vous pourriez avoir par rapport au fait qu'il s'agit d'un problème peu important.

[La diapositive change et le titre est le suivant : « Graphique : Les capitaux à l'ère des marchés modernes. » Le graphique présente une ligne rouge qui monte de manière exponentielle sur une ligne du temps à partir de 1981. Le titre du graphique est : « Financialisation de l'économie américaine. »]

Le premier montre ce qui est arrivé aux vendeurs sur les marchés financiers au cours des 25 dernières années. La financialisation, c'est cet énorme stock de ressources et d'avoirs monétaires puisé dans l'économie du monde réel et versé dans la vente et la revente tout à fait inutiles d'actifs financiers. Du point de vue d'un investisseur, c'est tout à fait logique : pourquoi, alors que les marchés sont aussi bons, des coûts indirects aussi bas, un tel niveau de sécurité sur le plan des risques liés aux transactions? Cela permet de générer des données qui vous procurent toutes sortes d'outils. Pourquoi voudriez-vous investir votre argent dans le vrai monde désordonné assujetti aux frictions de la création des entreprises et des emplois et de l'amélioration des services? Voilà pourquoi cela se passe ainsi, c'est parce que les ressources gravitent constamment autour du marché le plus efficient. Et que s'est-il passé avec le travail à l'ère des marchés modernes? Il y aura eu des booms sur le marché de l'emploi au Canada pendant ce temps, comme dans d'autres pays. Mais voici ce qui se passe en coulisses selon moi. Il s'agit de données américaines, mais, une fois de plus, la situation ne serait pas très différente au Canada.

[La diapositive change et le titre est le suivant : « Graphique : la main-d'œuvre à l'ère des marchés modernes. » Le titre du graphique est : « Index de la qualité des emplois dans le secteur privé américain. » Le graphique montre deux lignes semblables, la première étant la « Faible qualité » et la deuxième, la « Grande qualité ».]

Les « emplois » qui sont créés de nos jours pour les individus les moins qualifiés sont, en général, des emplois de technicien intermédiaire. Et ce technicien doit contrôler, marchander et déprécier les travailleurs, les vendeurs sur ces plateformes. Voilà où se situe le problème lorsqu'il est question des inégalités sur le marché. Il s'agit essentiellement de fausser l'économie, de siphonner des ressources tout en rendant impuissant et en dépréciant les gens – ceux dont nous nous préoccupons tous – qui forment le tissu économique. Alors c'était la première partie.

[Le partage d'écran se termine.]

Taki Sarantakis : Wingham, vous avez montré votre côté technophile, mais juste assez. Vous étiez du genre « technophile qui lit The New Yorker », ce qui signifie que toute personne intelligente comprendra ce que vous venez de dire. Il n'est pas nécessaire d'être un spécialiste. Félicitations, vous avez fait du beau travail. C'est une belle présentation.

Je ne vais pas lancer une conversation à ce sujet entre la première et la deuxième parties, mais je vais retenir trois points à l'intention de notre public parce que celui-ci est composé de fonctionnaires. Et les fonctionnaires n'ont pas à composer avec cela sur une base quotidienne. Je tenais à revenir sur ces trois points puisque c'est vraiment important que les gens comprennent bien ces aspects. Certains d'entre vous comprennent parce que c'est ce que vit votre conjoint ou conjointe, ou ce que vivent vos enfants, vos proches ou vos amis. Mais vous savez, nous évoluons dans un genre d'ensemble de bulles à la fonction publique du Canada. L'une de ces bulles est l'emploi de durée indéterminée s'accompagnant d'avantages et de toutes ces belles choses dont nous profitons. Mais ce n'est pas le genre de vie que mènent la plupart des Canadiens ni la plupart des gens sur cette planète. Je vais donc retenir trois choses dont Wingham a parlé et m'attarder vraiment à celles-ci.

Tout d'abord, il a parlé du travail et du fait que, par le passé, les notions de travail et d'emploi signifiaient la même chose pour la plupart d'entre nous. Désormais, ce qui se passe, c'est que le « travail » est décomposé en tâches constitutives. Par la suite, chacune de ces tâches est impartie à ces marchés efficients. Pensez au travail de fonctionnaire que vous accomplissez chaque jour. Vous exécutez peut-être, vous savez, 30 tâches différentes pendant une même journée, mais vous mettez peut-être en pratique quatre habiletés au travail. L'une de ces habiletés pourrait être l'ordonnancement, et une autre, la rédaction de documents quelconques. Une troisième habileté pourrait être l'utilisation d'un logiciel, etc. Ce regroupement de tâches, ce n'est pas seulement votre travail, mais c'est aussi votre emploi. Et, dans de très nombreuses situations, de nos jours, ce n'est plus le cas. Ce regroupement n'existe pas lorsqu'il est question du travail. Il existe en tant que tâches que des gens ou, plus exactement, ces plateformes, regroupent pour exécuter certaines choses.

Le deuxième élément que je veux retenir de l'exposé de Wingham est le fait que les statistiques qu'il vous a montrées ne sont pas négligeables. On parle ici du tiers de la population. Le genre de population apte à l'emploi présente ce type de participation à la population active. Cette proportion pourrait augmenter davantage après la pandémie. Certains d'entre nous aiment ce genre de participation, de faible participation, ce que Wingham appelle les travailleurs intermittents par choix, ces gens qui accordent plus d'importance à leur temps qu'à leur revenu à un moment donné de la journée ou de leur vie. Mais il y a d'autres gens qui sont, comme Wingham l'a mentionné, des travailleurs intermittents de base qui, pour diverses raisons, arrivent et partent, car ils ne peuvent occuper un emploi à temps plein. Il y a finalement le dernier groupe, les plus malchanceux, qui sont, en quelque sorte, les travailleurs intermittents obligés. Ce sont des gens qui, comme vous et moi, veulent un emploi à temps plein avec des avantages sociaux, mais qui sont incapables d'en trouver un. Alors, c'est de cette façon qu'ils contribuent au marché du travail.

Alors, n'oubliez pas. Ce n'est pas un pourcentage négligeable de l'effectif. Ce peut être négligeable pour ce qui est de votre vécu et du vécu de vos amis. Mais vous n'entrez pas dans la norme. Vous êtes plus.... Nous ne formons pas des échantillons représentatifs de la fonction publique moderne. Le troisième élément sur lequel je veux insister est cette notion de marché. Comme Wingham l'a dit, les marchés sont anciens. Vous avez sûrement deviné en entendant mon nom que je suis Grec. Le mot « marché » vient d'agora, là où les acheteurs et les vendeurs, un endroit où se réunissaient et se rencontraient les gens. Une fois de plus, nous sommes dans la fonction publique, nous travaillons ensemble à la suite d'offres d'emploi, qu'il s'agisse d'emploi pour une période déterminée ou indéterminée, ou d'un emploi occasionnel. C'est ainsi que nous nous rassemblons. C'est de cette façon que je vends mon travail et que le gouvernement du Canada l'achète. C'est la même chose pour vous. Ce n'est pas le cas pour la vaste majorité des gens au Canada. Ils ne vendent pas leur travail à un acheteur de la même façon que nous vendons notre travail à notre employeur. Wingham, continuons avec la deuxième partie.

[Wingham continue le diaporama. La diapositive porte le titre suivant : « La solution : des marchés modernes pour tous. »]

Wingham Rowan : D'accord, merci. Merci. C'est un très bon résumé. Je veux maintenant que nous nous penchions sur la façon de corriger cette terrible injustice avant qu'elle ne s'aggrave, car le nombre de personnes qui travaillent dans un tel système fragmenté va augmenter. La force ainsi générée est en train de le tasser alors que l'on peut à peine commencer à l'exploiter pleinement. La solution, selon moi, ne consiste pas seulement à se lancer dans un affrontement réglementaire, mais plutôt à se demander ce que ces technologies pourraient faire si elles avaient pour tâche d'habiliter et de monétiser toute personne désirant exploiter et monétiser ses compétences, ses actifs, les choses qu'elles possèdent, l'argent qu'elle pourrait prêter, ses possibles compétences, etc. Pour ce faire, les responsables de l'élaboration des politiques doivent établir un lien entre ceci et une tendance historique.

[La diapositive change et le titre est le suivant : « Politique : avancées technologiques et interventions. » Des images apparaissent : un moteur à vapeur, une radio, une télévision et un cellulaire.]

De temps à autre, environ une fois par génération, une technologie fait son apparition, mais doit faire l'objet d'une intervention politique pour exploiter son potentiel. Mon exemple préféré est le pompage. Dans les années 1830, en Grande-Bretagne, le pompage était une technologie vraiment à la mode; elle permettait de déplacer des liquides à grande échelle. Des centaines de petites compagnies distributrices des eaux sont nées. Elles ont pompé l'eau des rivières vers des foyers bien nantis; le pompage pouvait se faire seulement à marée haute. L'eau était sale parce que les rivières étaient également utilisées pour l'évacuation des eaux usées, mais c'était quand même beaucoup plus pratique que de se rendre sur le rivage avec un seau plusieurs fois par jour. Ces petites entreprises ont donc prospéré. Est ensuite arrivé un groupe de personnes qui a dit que nous pourrions utiliser cette excitante nouvelle technologie pour pomper de l'eau propre en tout temps et la distribuer à tout le monde. Mais cela va fonctionner seulement si nous pouvons profiter d'une coordination des réservoirs. Seul le gouvernement peut permettre cela, car les gens disaient : « Il va falloir acheter des vallées, puis les inonder. » La Loi sur la santé publique de 1848 de la Grande-Bretagne a permis de faire avancer les choses. Tous les pays ont copié ce modèle. Et cette histoire s'est répétée avec l'électricité, la radiodiffusion, la téléphonie, les services postaux, les chemins de fer, l'offre de monnaie, le contrôle de la circulation aérienne, etc.

Ces technologies ont été lancées dans une phase qui s'apparente au Wild West alors qu'elles servaient habituellement à servir les gens déjà bien nantis. Par la suite, le gouvernement est entré en jeu et a examiné ce qu'il était possible de faire avec la technologie et a permis au tout de se concrétiser. Cela ne s'est pas fait naturellement. Des lois précises ont été adoptées pour créer chacun de ces services publics. C'est le cas pour les lois de deux pays, le Royaume-Uni et les États-Unis. Nous proposons une politique que nous appelons « Modern Markets for All », qui stipule que les gouvernements de partout dans le monde doivent veiller à ce que leurs citoyens et entreprises disposent d'un réseau routier cohérent, d'une masse monétaire, d'eau propre, etc. Nous allons aussi nous assurer que nos citoyens et entreprises locales peuvent réaliser ce potentiel économique sur les meilleurs marchés disponibles actuellement, et non sur les meilleurs marchés que la Silicon Valley et Wall Street veulent nous offrir.

[La diapositive change. Le titre est le suivant : « Projet de loi sur les nouveaux services publics : points à retenir. » Le texte à l'écran est : Pas un règlement sur les options en place; Plus ambitieux que d'habitude; Ne sélectionne pas de gagnants; Avantage régional; Opposition. Critères : La technologie peut résoudre des problèmes pour le gouvernement; Le gouvernement dispose d'installations uniques dont le milieu de la technologie a besoin.]

C'est dans ce contexte que je veux passer à travers quelques points à retenir de cet élément de la loi. Au cours des 200 dernières années, on a eu surtout tendance à dire : « Voici une nouvelle technologie, nous allons créer une version de celle-ci qui deviendra un service public. » Donc, premièrement, il faut établir une distinction. Cela ne concerne pas la réglementation. Le gouvernement britannique n'a pas décidé d'obliger les petites compagnies distributrices des eaux à pomper de l'eau propre, puis à la distribuer à tout le monde, en tout temps, même si une telle solution n'aurait pas été rentable pour elles. Le gouvernement britannique a dit : « Nous allons créer une solution de rechange. Les petites compagnies distributrices des eaux peuvent continuer de faire ce qu'elles veulent. » Cela permet de faire un choix.

Ainsi, lorsque le service public d'électricité a été créé, les gens n'étaient pas obligés de l'utiliser. Ils pouvaient opter pour une génératrice. Vous pouviez avoir un poste radio alimenté au gaz. Plusieurs options étaient disponibles. La raison pour laquelle ces services publics sont devenus aussi omniprésents n'est pas liée à la coercition. C'est plutôt parce que ces services étaient vraiment meilleurs et étaient devenus extrêmement populaires. C'est remarquable de voir à quel point ces services publics sont audacieux. Personne n'a déplacé de l'eau en fonction des quantités envisagées par la Loi sur la santé publique, et les responsables des politiques doivent montrer la voie à l'opinion publique. Donc ça, c'est très important.

Dans les années 1840, il n'y a pas eu une forte demande à l'égard de l'approvisionnement en eau propre. La plupart des gens qui vivaient dans les villes à l'époque ne savaient pas qu'il était possible d'obtenir de l'eau propre. Toutes les sources d'eau qu'ils avaient à leur disposition étaient sales. Les responsables des politiques ont dû expliquer qu'il existait un concept que l'on appelait l'eau potable, et que nous pouvions vous en livrer chez vous. Il n'était pas question de choisir des gagnants. La Loi sur la santé publique n'a pas désigné un modèle de pompage précis. Elle expliquait simplement que c'est ce que le pompage peut faire en général. L'avantage régional inspire souvent ce genre de loi, car la Grande-Bretagne a connu une révolution industrielle où nous avons eu droit à la coordination des chemins de fer, à l'approvisionnement en eau, qui a mené à l'urbanisation, au service postal, qui a créé une main-d'œuvre sachant lire et écrire. Mais, même en procédant ainsi, des gens s'opposent. On se retrouve alors avec les petites compagnies distributrices des eaux qui s'en prennent à la Loi sur la santé publique quelques années après son adoption. Si vous trouvez que cela ressemble à l'obligation du port du masque imposée où je me trouve actuellement, je tiens à vous rappeler que, dans le cas du choléra, nous sommes passés de – du point de vue du patient – du diagnostic à une toux creuse, à des crachats de sang et à la mort en quelques heures. Mais c'est quand même mieux qu'un service public d'approvisionnement en eau pour les compagnies distributrices des eaux. Il y aura donc de l'opposition.

Cela vaut la peine d'examiner les critères qui permettent de distinguer ces technologies puisque des milliers de nouvelles technologies ont été inventées au cours des 200 dernières années. Pourquoi avoir mis en place ces toutes petites interventions justifiées, précisément pour déployer un nouveau modèle s'appliquant à cette technologie? Vous n'avez qu'à penser aux routes pour trouver des réponses.

Si vous pensez au tout début des véhicules motorisés, les propriétaires fonciers partout au Canada créaient des routes et permettaient aux gens de conduire du côté qu'ils voulaient. Certains demandaient de conduire à droite. Certains suggéraient, poliment, de conduire à gauche. Ils utilisaient une signalisation extrêmement différente et appliquaient différents niveaux de revêtement routier. Certains créaient des routes qui se rendaient à des endroits utiles, tandis que d'autres pensaient davantage à dédoubler des routes qui existaient déjà, etc. Il s'agissait là d'un problème pour le gouvernement puisqu'une telle incohérence dans les routes ralentissait la croissance économique. Ainsi, le gouvernement répondait aux critères requis pour régler le problème. Il disposait d'installations uniques présentant des besoins en matière de réseau routier cohérent. L'expropriation des terres, le fait d'obliger les gens à conduire d'un côté de la route ou de l'autre, puis de punir ceux qui ne respecteraient pas cette décision arbitraire, etc. Une signalisation cohérente. Par conséquent, les technologies des marchés modernes répondent à ces deux critères d'une manière que les médias sociaux ou l'intelligence artificielle ou d'autres domaines du monde numérique sont incapables de le faire.

[La diapositive change. Le titre est : « Compromis : Aucun coût, opérateurs indépendants. » Deux listes apparaissent. Le titre de la première liste : Installations uniques : 1) Mesures de relance; 2) Interface; 3) Intégration de l'impôt/de l'aide sociale; 4) Déréglementation; 5) Marketing. Le titre de la deuxième : Obligation du secteur public : 1) Les opérateurs financent tout; 2) Petites transactions; 3) Marge brute selon un pourcentage fixe; 4) Décentralisé; 5) Gouvernance]

Pour tirer profit de cette politique que nous appelons « Modern Markets for All », nous devons nous assurer de n'imposer aucuns frais aux contribuables. Nous allons donc mettre en place une politique qui lancera un nouveau système de marchés électroniques fonctionnant exactement comme un service public. Pour y parvenir sans refiler la note aux contribuables et pour que ce soit plus acceptable sur le plan politique, je suggère d'y aller avec le principe de la concession.

Le gouvernement possède tout un ensemble d'installations qu'il pourrait confier exclusivement à un quelconque système de marchés électroniques couvrant l'ensemble du tissu économique. L'idée est la suivante... Le gouvernement dirait : « D'accord, pour une période de, disons, 20 ans, nous allons confier ces installations à un système de marchés qui, pour l'instant, n'existe pas. » Il s'agit d'une occasion d'affaires incroyable pour n'importe quel consortium du secteur privé qui souhaite financer, concevoir et faire fonctionner ces marchés. Ce consortium devra donc accepter toutes sortes d'obligations de service public, en échange des avantages conférés par le gouvernement. On parle d'une concession de 20 ans. Vous pourriez établir une règle disant que les consortiums rivaux peuvent soumettre des offres et que celui qui s'engage à offrir les services en présentant la plus faible majoration en pourcentage pour chacune des transactions en vue d'obtenir un retour remporte le contrat. À partir du moment où la concession a été obtenue, le gouvernement n'a plus qu'à se retirer. Mon exemple préféré de concession, sachant que les concessions peuvent connaître un succès incroyable, est la loterie nationale britannique. Notre gouvernement n'a pas financé, administré ni conçu la loterie nationale. Il a simplement adopté la Loi sur la loterie nationale. Et 90 % des Britanniques ont joué à la loterie nationale dans les 18 premiers mois de son existence.

[La diapositive change. La diapositive s'intitule « Marchés électroniques publics officiels Seamless: all micro-economy sectors ». En dessous, la liste est la suivante :

  • Anyone sell anything, equally – (Quelqu'un vend quelque chose, en toute égalité)
  • Full legal enforcement – (Application de la loi au complet)
  • (Anonymized) data shared – (De façon anonyme) données échangées)
  • No lock-in – (Rien n'est immobilisé)
  • Fixed transaction charge: (2%?) – (Frais de transaction fixe : (2 %?)
  • Government pump-priming – (Amorçage au gouvernement)
  • Enables: Investment, interventions – (Cela permet ce qui suit : investissements, interventions)]

Donc, une concession se fondant sur la politique « Modern Markets for All » créerait une plateforme que nous appellerons POEMS. C'est très difficile de décrire en seulement quelques mots à quel point POEMS changerait les choses. Ce serait comme essayer d'expliquer ce qu'est de l'eau potable à des Londoniens de l'époque victorienne. Nous sommes tellement limités dans notre compréhension des technologies des marchés modernes par les plateformes d'aujourd'hui, qui fonctionnent en silos, qui exigent des coûts indirects élevés, qui offrent des fonctions de très mauvaise qualité aux vendeurs et qui présentent des risques du point de vue des transactions.

Je vous demande de faire un pas en avant et d'imaginer une plateforme qui a été conçue, autant que possible, pour exploiter votre potentiel économique. Et je ne parle pas ici de votre potentiel de fonctionnaire. Je veux dire un citoyen possédant vraiment un minimum de compétences, qui est peut-être marginalisé. Tout est une question d'aller chercher des investissements et de mettre à niveau les compétences. Il s'agit de monétiser leurs actifs. Ainsi, il peut commencer à louer le vélo qu'il n'utilise pas ce matin. S'il peut en tirer 20 dollars et qu'il n'en a pas besoin dans les prochains jours. Il peut le louer sur des marchés sûrs et transparents. Il n'obtiendra peut-être pas un gros retour, mais c'est une transaction efficace et facile et sans danger, et vous pouvez la régler pour qu'elle se fasse automatiquement, etc. Nous n'avons qu'à – cela va au-delà de ce que nous pouvons concevoir.

[La diapositive change. Le titre est le suivant : « Marchés électroniques publics officiels. » Voici des exemples se trouvant sur cette diapositive : hébergement, soins esthétiques, prêts en espèces, livraisons, électriciens, serveurs d'aliments, transfert de bagages, locations de bureaux, espaces de stationnement, location de manuels, huissiers audienciers, rayon X, cours de yoga, visites d'un zoo et d'autres exemples semblables.]

La plateforme fait tout cela en demandant seulement des frais minuscules; elle est entièrement transparente et est bien gérée. Et pourtant, des milliers de secteurs se retrouveraient dans POEMS et présenteraient des tonnes de trucs utiles que des personnes ou des entreprises locales pourraient vendre. C'était donc POEMS. J'aimerais vous expliquer ce que la plateforme POEMS pourrait faire pour l'économie, et c'est tout aussi difficile, mais je vais essayer. Si l'on revient à son essence même, ce que la plateforme POEMS ferait si son lancement était réussi et qu'elle devenait populaire, il ne faudrait tenir aucun des deux aspects pour acquis. Mais si ce scénario était retenu et si la plateforme empruntait la même voie que la loterie nationale britannique, par exemple, vous commenceriez à voir de nouvelles ressources faire leur entrée dans l'économie.

[La diapositive change. Un tableau énumère des éléments positifs sous cinq sous-titres : 1) Intervention en situation de crise; 2) Soutien des oubliés; 3) Écologisation de la micro-économie; 4) Gouvernement et précision; 5) Compétitivité régionale.]

À un échelon très local, vous verriez toutes sortes de nouveaux fournisseurs de ressources. Vous verriez des gens aller au-delà des emplois, comme Taki l'a dit, au-delà du travail même, plus loin que cela. Comment puis-je tirer un revenu de ce barbecue que j'utilise seulement à l'occasion et des jouets qui n'intéressent plus mes enfants? Et la plateforme peut établir un lien entre tout cela et le marché et s'assurer que ces ressources sont vues, faire en sorte que quelqu'un les consulte et les consulte d'une façon... Nous n'avons pas le temps d'approfondir ce sujet. C'est à peu près de cela qu'il s'agit. On parle d'une tarification très précise puisque les coûts indirects ont chuté, et cela signifie une capacité d'adaptation, qui veut dire que les fournisseurs locaux deviennent beaucoup plus abordables, toutes proportions gardées.

Cela risque de pulvériser bon nombre d'activités et de les éloigner des gros vendeurs des entreprises et de les rapprocher des vendeurs à une échelle très locale. Et les interventions deviennent beaucoup, beaucoup plus efficaces. Et beaucoup plus axées sur les données. C'est donc un tout autre monde, et tout cela est viable d'un point de vue technologique. C'est viable d'un point de vue commercial. Nous attendons que les responsables des politiques ouvrent la voie à ce monde de possibilités. C'est ainsi que prend fin la deuxième partie.

[Le partage d'écran se termine.]

Taki Sarantakis : Il est maintenant temps d'avoir une conversation, car, comme vous l'avez dit, cela ressemble à un acte de foi. C'est comme imaginer un monde complètement différent. Imaginez un nouvel ensemble de... disons... de relations entre, vous savez, les acheteurs, les vendeurs, le travail, le capital, etc.

Vous avez mentionné que tout cela ne concerne pas la réglementation. Et pourtant vous avez mentionné de nombreux exemples plus tôt, le secteur des services publics, qu'il s'agisse du service de téléphone ou de l'énergie ou de l'eau, ces services sont tous synonymes de réglementation. Par exemple, le fait que quelque chose devienne un service public, d'une certaine façon, cela signifie qu'il faut le réglementer. Et la raison pour laquelle on réglemente quelque chose, c'est parce que cela s'apparente à un service public. Donc, c'est un peu comme l'histoire de l'œuf et de la poule, mais vous avez bien dit que ce n'était pas une question de réglementation. Alors, si ce n'est pas de la réglementation, de quoi s'agit-il?

Wingham Rowan : En effet, je m'excuse. C'était... Je me suis mal exprimé. J'aurais dû dire que ce n'est pas qu'une question de réglementation.

Taki Sarantakis : Oh, d'accord.

Wingham Rowan : Le concept avec lequel je veux le comparer par exemple, ce que la Californie a fait, alors qu'elle était confrontée aux excès d'Uber, a été d'essayer de forcer Uber à se rapprocher de ce qui constitue un marché du travail responsable.

Taki Sarantakis : Ok. Donc...

Wingham Rowan : Oui. La plateforme POEMS serait hautement réglementée et transparente également.

Taki Sarantakis : D'accord. Et je m'excuse pour ma méprise à cet égard.

Wingham Rowan : Non, non. C'était de ma faute. J'ai sauté un mot-clé.

Taki Sarantakis : Revenons à ce que nous disions. Par exemple, disons que nous sommes environ un an... disons que l'invention de la version commerciale d'Internet a eu lieu il y a un quart de siècle. Au début, avec l'Internet commercial, l'un des principaux... je crois que les gestionnaires voulaient dire au gouvernement : « Le gouvernement ne doit pas intervenir! Contentez-vous de vos affaires gouvernementales! Que le gouvernement ne vienne pas bousiller cela aussi. » Et je ne sais pas jusqu'à quand c'était... Vous pouvez choisir une date. Je ne sais pas quand c'était. C'était il y a trois ans, cinq ans, six ans, deux ans – la technologie ne pouvait pas faire de tort. Et maintenant, on dirait que la situation est rendue complètement à l'opposé et que la technologie n'apporte rien de bon. Évidemment, dans les deux cas, c'est ridicule en quelque sorte, car ils polarisent le débat aux deux extrêmes. La réponse serait, comme c'est souvent le cas, quelque part entre les deux extrêmes.

Mais donnez-nous un exemple ou une manifestation concrète de ce dont vous parlez. Parce que vous avez parlé de certaines plateformes, et il en existe des tonnes. Vous savez, il y a TaskRabbit, il y a Uber, il y a Jiffy, et ainsi de suite. Alors diriez-vous que ces plateformes en particulier devraient être réglementées ou nationalisées ou combinées ou remplacées? Vous pourriez nous les faire découvrir. Vous avez utilisé Uber comme exemple principal. Je crois que c'est un bon exemple parce que nous parlons tous de l'ubérisation de l'économie ou de l'ubérisation de, vous savez, cette industrie-ci ou celle-là... Vous pourriez nous les présenter. Qu'arriverait-il à Uber dans le scénario dont vous parlez?

Wingham Rowan : La première chose dont il faut absolument être certain, Taki, ça ne concerne pas la nationalisation d'Uber, ni le fait d'obliger Uber à faire quoi que ce soit en travaillant en collaboration avec quelqu'un d'autre, de permettre l'accès à ses données, de diminuer ses frais ou autre chose. Bien franchement, je ne me préoccupe pas de ce que fait Uber. Uber est comme une petite entreprise qui pompait de l'eau sale pour des foyers bien nantis à Hampstead dans les années 1830. Uber représente une infime portion du potentiel que les technologies du marché moderne peuvent offrir. L'entreprise est conçue en fonction des besoins des acheteurs; c'est ce qui a fait son succès. Je vous fais une révélation : j'utilise les services d'Uber seulement parce que c'est pratique et vraiment abordable. Donc, vraiment, je n'ai aucun intérêt envers cette entreprise.

Ce que je veux dire... Ce serait comme demander à un défenseur de la santé publique de 1848 ce qu'il faudrait faire à propos de la compagnie distributrice des eaux d'Hampstead. Je ne sais pas. C'est vraiment mineur par rapport à l'ampleur de tout ce que cette technologie devrait pouvoir faire pour nous. Ce dont je veux parler, c'est l'idée de créer une solution de rechange, une autre possibilité. Sans contredit, vous pourriez être chauffeur pour le compte d'Uber si vous le vouliez. Mais si vous voulez utiliser les marchés des services publics, faites-le à la place de l'alternative, ou faites-le en plus. Utilisez-les autant ou aussi peu que vous le voulez. Vous savez, c'est ainsi que fonctionnent les services publics. Les gens ont tendance à utiliser des termes apocalyptiques, vous savez, du genre : cela va tout accaparer. Non, ce n'est pas le cas. Vous pouvez encore utiliser – vous pouvez acheter une génératrice pour chauffer votre domicile si vous préférez. La compagnie d'électricité ne pourra pas vous en empêcher. C'est la question que l'on se pose. Et qu'est-ce que cela va faire à Uber et aux autres? Bon, une fois de plus, bien franchement, cela ne m'inquiète pas vraiment parce que je ne crois pas que la politique publique devrait être motivée par ce qui est bon pour ces entreprises de la Silicon Valley qui servent à s'enrichir rapidement et qui se trouvent à avoir réalisé bon nombre de gains sur le plan des relations publiques dans les dernières décennies. Mais, si ces entreprises étaient intelligentes, elles commenceraient à s'adapter à POEMS et commenceraient à se demander : « Que pouvons-nous faire qui est exclusif et que POEMS ne fait pas? Où pouvons-nous apporter une valeur ajoutée? » Il existe toutes sortes de réponses à cette question. Vous savez, elles pourraient se concentrer beaucoup plus sur les aéroports ou sur autre chose. Bien franchement, c'est un élément secondaire si votre préoccupation principale dans le domaine de la politique est : Qu'est-ce qui est bon pour Uber? Je vous fais perdre votre temps.

Taki Sarantakis : Non, et je ne parlais pas d'Uber en soi. J'utilisais Uber comme exemple de plateforme, car le lien conceptuel que nous devons faire est... Vous ne parlez pas des plateformes existantes. Vous semblez pratiquement indifférent à leur égard. Comme si vous vous disiez : elles peuvent faire ce qu'elles veulent, ça ne m'intéresse pas. Vous parlez d'une nouveauté qui est en train de se mettre en place. C'était votre troisième partie ou si nous continuons de parler de ce sujet maintenant?

Wingham Rowan : La troisième partie est très courte. Que peut faire le gouvernement s'il veut commencer à prendre des mesures exploratoires allant dans cette direction?

Taki Sarantakis : D'accord. Et maintenant, avant de passer à la troisième partie, nous avons surtout parlé du travail, mais nous avons aussi parlé à quelques reprises de votre barbecue et, vous savez, de votre vélo ou des jouets de vos enfants qui sont entreposés dans le garage. Êtes-vous en train de dire que c'est quelque chose qui devrait être utilisé comme actif, et non pas seulement le travail?

Wingham Rowan : Oui, absolument. Donc, n'oubliez pas, il s'agit simplement de vous donner des choix, et j'entends par là des choix typiquement canadiens. Cela ne vous oblige à rien. Mais si vous voulez faire de l'argent à partir des jouets de vos enfants ou de l'équipement pour salon de beauté que vous avez chez vous ou de vos outils de bricoleur, pourquoi ne pourrions-nous pas vous aider?

Pourquoi insistons-nous sur le fait que les travailleurs les moins qualifiés peuvent vendre uniquement leur travail? Tandis que les gens les plus, vous savez, qualifiés qui ont des actifs financiers font de l'argent de toutes sortes de façons. Permettons aux gens qui le désirent de tirer profit de ces actifs. Il y a un résultat possible : ce pourrait être très bon pour l'économie. Disons que j'ai une perceuse électrique. Je l'utilise, vous savez, 0,1 % du temps. Pourquoi je ne ferais pas d'argent avec cet outil au lieu de le laisser sur une tablette alors que mes voisins ont eux aussi une perceuse électrique qui ne sert pratiquement jamais? Alors regardons ce que nous pouvons faire pour rendre ces marchés aussi efficients que possible.

Taki Sarantakis : Oui, c'est très intéressant, car nous savons qu'il se produit un gaspillage d'actifs incroyable, comme avec l'exemple de la perceuse que vous avez mentionné. Je me souviens avoir lu quelque part... je crois que c'est vrai, mais, vous savez, je ne peux le garantir. Mais, vous savez, la perceuse électrique moyenne, pas celle utilisée par un entrepreneur, mais plutôt par une personne comme moi qui fait de petits travaux autour de la maison à l'occasion... Cet outil est utilisé quelque chose comme moins de deux heures pendant toute sa durée de vie. Alors, vous savez, je me demande pourquoi j'ai fait une mise de fonds pour acheter un objet que je conserverai pendant des années. Mais, en tout, je ne vais l'utiliser qu'environ deux heures, si c'est bien le cas. Il y a aussi, vous savez, nos voitures, qui sont, pour bon nombre de Canadiens, leur deuxième achat en importance. Pour la plupart d'entre nous, notre voiture ne sert pas, vous savez, dans certains cas, 16 ou même 23 heures par jour. Vous savez, il n'y a pas beaucoup d'actifs dans le monde commercial qui pourraient survivre ou être économiquement viables s'ils étaient non productifs, vous savez, la vaste majorité du temps que ces actifs sont déployés. Passons maintenant à la troisième partie.

[Wingham partage son écran. Le titre de la diapositive est : « Application immédiate : Infrastructure publique pour les travailleurs à la demande. » Le titre suivant apparaît : « Pour améliorer notre situation financière, nous travaillons à réduire les mesures incitatives accordées aux chauffeurs, mais nous pouvons nous attendre à une diminution de la satisfaction de ces derniers. » – Déclaration d'Uber à la SEC, avril 2019]

Wingham Rowan : Ok. Donc, troisième partie. Alors, nous avons cerné le problème, les inégalités sur le marché et ses nombreux symptômes. Nous avons trouvé la solution générale, radicale et ambitieuse, pour corriger la politique. Je voudrais revenir sur la première mesure qui a été prise, car pour ceux d'entre nous qui sont derrière cette politique, et je parle d'un groupe de Britanniques dont je faisais partie ayant travaillé à cette politique il y a très longtemps, dans les années 1990... Nous voulions éliminer certaines sections qui auraient pu se concrétiser au lieu de laisser la politique telle quelle, soit un genre d'objectif politique très élégant, mais dangereusement ambitieux.

Alors, nous nous sommes concentrés sur un aspect qui était : Comment créer de meilleurs marchés du travail pour les gens qui font du travail à la demande? Le besoin est évident. Vous savez, le fait qu'Uber fasse une déclaration à la SEC résume bien sa position pour ce qui est d'habiliter les gens qui ont besoin de vendre leurs heures. Je tiens à souligner que les gens qui font du travail à la demande un peu partout dans le monde ont fortement tendance à être des personnes de couleur, des femmes et des gens peu qualifiés. Nous parlons ici de gens vraiment vulnérables.

[La diapositive change et le titre est : « Contexte : infrastructure du marché du travail public. » On voit des images de Planification de main-d'œuvre de l'Ontario et d'un guichet-emplois du gouvernement du Canada.]

La première chose qu'il faut préciser, c'est qu'il n'y a rien d'anormal dans le fait qu'un gouvernement fournisse de meilleures infrastructures aux marchés du travail. Le Canada compte un réseau de plusieurs milliers de centres d'emplois. Ces centres côtoient des agences de placement commerciales. Le Canada compte un site d'emplois fourni par le gouvernement, qui est ouvert à tous les secteurs et à tous les employeurs légitimes. C'est une solution de rechange à Indeed.com, à Monster.com et aux sites d'emplois commerciaux. Mais il n'existe aucune infrastructure publique pour les gens qui ne peuvent travailler que selon un horaire irrégulier, qui ne sont pas assez chanceux pour être disponibles 40 heures par semaine, dans bien des cas. C'est cette irrégularité qui a permis aux entreprises de la Silicon Valley qui servent à s'enrichir rapidement de s'épanouir complètement.

[La diapositive change pour montrer un graphique tiré de www.cedah.video. Le texte en dessous est le suivant : Base de données centrale des heures à attribuer.]

Voilà le problème que nous avons décidé de résoudre au sein des programmes du gouvernement du Royaume-Uni que je dirigeais. Nous avons créé une technologie. Je n'ai pas le temps de vous la montrer, mais elle existe vraiment. Cela pourrait être utile au Canada dans l'avenir. Les gens s'en servent actuellement pour faire des transactions en Californie. Elle est entièrement conçue dans le but de donner le contrôle aux travailleurs. Leur donner une protection pleine et entière, donner de la stabilité à ceux qui en veulent. Faire progresser tout le monde, les responsabiliser, mais aussi fournir un effectif harmonisé de qualité dans chaque domaine. Il y a eu des discussions avec le comité de reprise des activités mis en place par le gouvernement de l'Ontario au sujet de la possibilité de faire quelque chose de semblable au Canada. Tout cela existe et c'est très concret. Des travaux ont été réalisés avec des organismes publics dans le but de déterminer comment faire pour que ce genre de plateforme fonctionne à l'intérieur de systèmes basés sur un effectif public. Mais il y a aussi cette grande vision très tentante.

[La diapositive change. Le titre est le suivant : « Pourquoi maintenant? Le capitalisme est à la croisée des chemins. Ce n'est qu'une question de temps avant qu'on ne fasse le procès du capitalisme. – Financial Times, 31 décembre 2020. »]

Les marchés modernes partout à la grandeur de la micro-économie essaient d'offrir aux gens des possibilités que, bien franchement, les gens ne peuvent probablement même pas réussir à s'imaginer actuellement. Ce n'est pas seulement un meilleur modèle du travail à la demande. Et nous croyons que c'est le bon moment. J'ai écrit des livres à propos de tout cela dans les années 1990, et cela a toujours été perçu comme étant marginal. Vous savez, l'hypothèse était, comme vous l'avez mentionné Taki, l'hypothèse était que la Silicon Valley et Wall Street allaient créer une vision pour ces nouvelles technologies et que le reste du monde serait émerveillé par tout ce qui allait en découler. Voilà que tout cela commence finalement à changer, comme vous l'avez laissé entendre.

[La diapositive change et le titre est : « Enfin : la fin de l'émerveillement ». La diapositive est divisée en 3 sections. La première affiche une manchette tirée du Forum économique mondial affirmant ce qui suit : « Plus de 40 % des Américains estiment que le socialisme est une bonne chose » – 29 mai 2019. La deuxième section montre des gens protestant contre Lyft et Uber. La troisième section présente un terrain vague qui pourrait être la Terre de l'avenir si les changements climatiques deviennent hors de contrôle.]

Il y a cette perte de confiance à l'égard du capitalisme, qui se manifeste dans toutes sortes de rage populaire. Les gens ont l'impression que le système joue contre eux; comme nous venons de le voir, c'est bien le cas. Nous avons connu le « techlash ». Et finalement, nous avons arrêté de nous émerveiller devant ces entreprises. Elles ne sont pas si brillantes. Elles ne font que mettre ensemble des groupements de bases de technologies financées par le gouvernement. Leur imagination est souvent... est habituellement orientée vers les modèles de financement et d'affaires. Et il y a la crise climatique. Et les marchés représentent un enjeu fondamental dans le dossier des changements climatiques. Les marchés, à la base, définissent les ressources qui feront partie de l'économie, qui les fournit, comment elles transigent, quel est l'aspect financier d'une quelconque intervention, quelle quantité nous consommons, toutes sortes de choses. On ne prête pas assez attention au rôle et au potentiel des marchés dans la lutte contre le chaos climatique.

[ La diapositive change et montre les coordonnées de Wingham. La diapositive indique « Merci de votre écoute ». « Même les irréductibles du mouvement progressiste semblent croire que la prospérité économique est la chasse gardée des travailleurs à temps plein. – New York Times, 11 septembre 2018. »]

Nous croyons que nous avons peut-être finalement trouvé le juste équilibre. Nous ignorons quel gouvernement va se lancer en premier avec... Nous nous penchons sur une politique de marchés modernes pour tous. Nous ne savons pas quel camp va décider de l'adopter. C'est fondamentalement apolitique. Ce n'est qu'une mise à niveau de l'infrastructure. Mais tout cela pourra se mettre en branle quand les responsables de l'élaboration des politiques penseront plus loin que les emplois et verront ce nouveau monde permettant aux gens de faire de l'argent de différentes manières fragmentées et réfléchiront à la façon d'habiliter les gens selon ce nouveau concept.

[Le partage d'écran se termine.]

Taki Sarantakis : Merci. C'est particulièrement intéressant. J'aimerais consacrer les dernières minutes... Parce que vous plaidez quand même un peu en faveur, je dirais, de l'utilisation des outils modernes dans l'intérêt public. Comme la technologie pour l'utilisation de biens. Et à quoi comparez-vous cela? On parle d'une coopérative? Ce serait plutôt le gouvernement? Je sais que vous avez mentionné les concessions plus tôt. Mais à quoi cela... Donnez-nous un exemple concret, comme le gouvernement qui dirait : « Ok, vous êtes notre plateforme pour... » Je ne sais pas... Disons une tâche de livraison dans un restaurant.

[Wingham secoue la tête.]

Et, oh, j'avais mal compris. Alors comment cela fonctionnerait-il?

Wingham Rowan : Ok, Taki. Il faudrait que je vous cogne la tête contre le mur puis que je vous dise...

Taki Sarantakis : Alors faites-le virtuellement.

Wingham Rowan : Taki, il faut que vous arrêtiez de réfléchir en fonction des modèles d'affaires de la Silicon Valley.

Taki Sarantakis : D'accord.

Wingham Rowan : Dans le cas du vendeur, les marchés souhaités sont horizontaux. Je veux vendre tout mon éventail de compétences et d'actifs dans un seul marché. Avec toutes les données, je dois décider de ce que je peux vendre et quand, et ce qui vaut la peine d'être vendu. Donc, l'idée d'avoir un marché pour les livraisons des restaurants, un marché pour les trajets en taxi, un marché pour l'hygiène dentaire, un autre marché dans lequel vous faites des tâches d'entretien chez les voisins, c'est le modèle d'affaires de la Silicon Valley qui doit être cloisonné parce qu'ils doivent dépenser dans des activités de marketing pour approfondir leurs pseudomarchés. Et le seul modèle viable pour ce faire est celui du créneau très étroit. Si vous décidiez de poser une question très différente... Comment pouvons-nous créer un ensemble de marchés modernes économiquement autonomes? Vous en viendriez très rapidement à cette conclusion. Ce doit être horizontal. Il faut que ce soit une plateforme à partir de laquelle n'importe qui peut vendre n'importe quoi.

Bon, nous n'avons pas le temps de nous pencher sur la façon de structurer tout cela pour que ça ne devienne pas trop intense. Qu'il n'y ait pas d'abus de pouvoirs, ce genre de choses. Je vous demande juste d'accepter l'idée que ce concept est tout à fait possible. Nous avons démontré tout cela dans le site « modern markets for all point org », « modern markets for all point org ». Donc, il faut arrêter de penser en fonction du modèle de la Silicon Valley. Ce n'est que la phase « Wild West » de ces technologies. Lorsqu'elles deviendront vraiment utiles, et Wall Street le sait, c'est alors qu'apparaîtront les marchés horizontaux. C'est l'un des arguments. Les services publics qui sont conçus en fonction des nouvelles technologies sont souvent beaucoup plus ambitieux que toute autre vision pour une même technologie présentée précédemment.

Taki Sarantakis : Je ne vous laisserai pas vous en tirer aussi facilement. Je ne comprends pas pour ce qui est d'aujourd'hui, je vous l'accorde. Mais parlez-nous un peu plus de demain.

Wingham Rowan : Bon, disons que tout cela passera par une série d'étapes. Alors, la première étape pourrait être, disons, et c'est très intéressant pour le Canada actuellement... Vous savez, vous êtes dynamique. Vous avez une idée de la situation. Vous ne vous enlisez pas dans la polarisation de la politique et les impasses politiques, comme votre voisin au Sud, ou par le Brexit, comme dans le cas de votre petit voisin de l'autre côté de l'Atlantique. Supposons, pendant un instant, qu'une personne influente dans le domaine politique au Canada disait : « D'accord, j'ai tout simplement le goût de commencer à examiner tout cela. »

Disons qu'il mettait en place une quelconque commission gouvernementale étudiant la qualité des marchés. La moitié de nos citoyens et de nos entreprises locales ont obtenu les meilleurs marchés qui étaient alors disponibles pour exploiter leur potentiel économique. J'ai l'impression que la commission conclurait rapidement par la négative, mais vous vous posez probablement la question. Supposons maintenant que cela mènera à une certaine forme de concession. Étant entendu qu'il n'y aura absolument aucun financement public en cause. Dans le pire des scénarios, c'est tout le régime qui va s'effondrer. Dans un tel cas, l'investisseur, les actionnaires du consortium qui ont repris la concession vont encaisser un coup terrible. Mais cela ne va probablement pas alarmer l'électorat canadien. Ils se retrouveront encore là où ils étaient avant la concession.

Donc, supposons que tout cela fonctionne et que vous possédez désormais une plateforme intitulée POEMS, sur laquelle n'importe qui peut vendre légalement n'importe quoi sur celle-ci. Cette plateforme génère des données. Elle cherche constamment à accroître les ventes de chaque personne en voyant cela comme son actif économique. Et c'est la seule façon pour le consortium qui exploite la plateforme de faire de l'argent avec celle-ci. Vous savez, la plateforme est décentralisée, est transparente et est prévisible. Ce que je veux dire, c'est qu'elle est simplement...

Taki Sarantakis : Et vous ne faites pas.... Vous n'interdisez aucune autre plateforme. Vous ne dites pas : « Si vous voulez faire X, vous devez le faire au moyen de cette plateforme. » La plateforme fait concurrence sur le marché.

Wingham Rowan : Oui, je vois. La seule chose que vous devez faire par l'intermédiaire de la plateforme est, si vous êtes une entité du secteur public, a) promouvoir la plateforme dans le cadre de vos activités de promotion auprès de votre clientèle; b) inscrire vos dépenses prévues pour les communautés dans les plateformes. Ainsi, le nettoyage d'édifices gouvernementaux, la garde d'enfants, les enseignants suppléants, les travailleurs de la santé, vous savez, le portefeuille de l'État... Je ne sais pas combien cela représente au Canada. Ce ne serait pas environ 38 % du PIB?

Taki Sarantakis : C'est un assez gros montant. Je ne suis pas certain que ce soit aussi élevé, mais c'est assez élevé.

Wingham Rowan : D'accord, vous n'allez pas acheter de sous-marins nucléaires par l'intermédiaire de la plateforme, mais toutes les dépenses gouvernementales à l'échelon communautaire doivent passer par la plateforme. C'est le principe de réamorçage. À moins que l'on puisse démontrer qu'il est possible de réaliser un gain d'efficience d'une autre façon. Mais vous ne pouvez pas regrouper artificiellement vos besoins pour créer un « gain d'efficience ». L'intention n'est pas de créer une plateforme d'approvisionnement pour le gouvernement. Ce n'est que le point de départ. Ensuite, c'est ouvert à tous. Donc, je pourrais vendre mon temps à titre d'aide-enseignant puisque des écoles locales ont besoin de moi, mais je suis également libre de vendre mes services de garde d'enfants. Le système pourrait dire, vous savez, si vous avez une certification d'entraîneur dans un sport, vous pourriez faire 12 % de plus. Voulez-vous que nous mettions cette certification à niveau? Nous avons un investisseur qui va payer si vous l'autorisez à prélever 10 % de vos gains accrus au cours des trois prochains mois. C'est ce genre de trucs. Ce n'est qu'une roue qui se met à tourner. Et effectivement, vous n'êtes pas du tout obligé de l'utiliser. Si vous aimez Uber. Restez avec Uber.

Taki Sarantakis : Alors, Wingham Rowan, nous avons eu une conversation fascinante. Je crois, comme vous l'avez dit, que nous sommes au bord du précipice de quelque chose. Aucun d'entre nous ne sait exactement de quoi il s'agit, mais nous savons que demain sera probablement différent d'aujourd'hui. Nous observons une grande dynamique pour ce qui est de soulever les inégalités entre le monde occidental et le monde oriental dans certains cas. Il y a beaucoup de fonctions qui ont toujours appartenu au gouvernement et qui se retrouvent désormais entre les mains de ces géants du secteur numérique. Nous avons des témoignages provenant de capitales occidentales de gens qui se demandent comment ils vont se démarquer dans le domaine de la technologie? Comment allons-nous nous attaquer à ce problème? Comment allons-nous le régler? Voilà une idée intéressante à partager. Le secteur public devrait commencer à se demander comment il pourrait utiliser certaines de ces technologies dans l'intérêt public au lieu de se contenter de dire : « Eh bien, vous savez, nous allons interdire ceci, éliminer cela et réglementer telle autre chose. » Wingham Rowan, merci de votre temps. C'était vraiment très intéressant. Prenez soin de vous. Nous vous souhaitons beaucoup de succès. Merci beaucoup.

Wingham Rowan : Merci.

[L'appel vidéo s'efface au profit du logo de l'EFPC.]

[Le logo du gouvernement du Canada apparaît, puis s'éteint dans le noir.]

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